http://igmarette22.cowblog.fr/images/medical013.gifEt la journée continue......dans la joie et la bonne humeur .?http://igmarette22.cowblog.fr/images/imagesCAU2XAXE.jpg
Je continuerai ma matinée comme je l'ai commencée....sans parvenir à savoir de quelles pathologies souffre chaque résident afin d'adapter mon comportement.Le principal est fait, comme dira ma collègue une fois la tâche terminée, "les toilettes sont terminées".Sauf "une", dans la chambre qu'il reste, un Monsieur Y est là, la présence de deux soignants est exigée par la responsable.Dès mon entrée dans sa chambre, je commence à comprendre.Elle est fermée à clef. Le lourd trousseau dont nous disposons ouvre la porte.Une odeur presqu'insoutenable me prend par surprise à la gorge. Pourtant, je ne suis pas sensible de nature....Le matelas est par terre. Je note d'un regard le papier peint déchiré, les draps maculés d'urine et d'excréments dans un coin.On dirait qu'il y a eu une tornade pendant la nuit....
Assis tout nu sur une chaise, un homme nous regarde de manière agressive, apparemment, prêt à bondir sur l'une de nous.Et son choix se porte....sur moi !Je n'ai pas le temps de me jeter sur le côté afin de l'éviter. Le vieil homme m'empoigne par derrière et me plaque contre le mur en criant des mots obscènes à tue-tête, ponctués de mouvements contre mon dos.Bien que surprise par sa force, mais surtout en colère de ne pas avoir été prévenue de son penchant, je le retourne et le pousse sur la chaise avec précision. Je ne suis pas "un lapin de 6 semaines", j'ai travaillé dans des services fermés en Psychiatrique, et dans ces cas là, je suis réactive.Ma collègue, d'un geste, d'un seul, empoigne la sangle, et pendant que je le maintiens, elle l'attache à la chaise. Un ballet bien orchestré, avec rapidité, Monsieur Y n'a pas eu le temps de protester.J'ai toujours été contre le fait de maintenir un résident de cette façon, mais je me rend bien compte que "la contention" (on n'attache JAMAIS une personne, on la CONTIENT), est inévitable dans certains cas, autant pour nous, que pour eux.Pendant que nous lui ferons sa toilette, nous prendrons garde aux coups de pieds, ainsi qu'au morsures et autres crachats.L'une le tient, l'autre le lave, et cela ne lui plait absolument pas !Je préconise et j'essaie toujours de faire mon travail en verbalisant les actes, en parlant au patient, mais je me rend rapidement compte que rien n'y fera.Je sais qu'il comprend ce que je dis, mais cela le rend fou de rage et décuple ses forces, alors, pour la première fois de ma carrière, je fais la toilette dans le silence, résolue à éviter les coups.A chaque fois que j'essaierai de le calmer, avec douceur, ou plus durement, ce patient hurlerades obcénités à mon égard, les yeux injectés de sang, la langue pendante.Je me demande s'il est bien au bon endroit dans ce foyer....Enfermé dans une chambre, attaché la plupart du temps, aucun traitement ne semble agir sur lui.....mais cela n'est pas de mon ressort, juste celui de l'équipe soignante gradée et de son médecin.Nous, les "petites mains", sommes là pour le rendre présentable en salle commune.La sangle est cachée par un plaid, rien ne laisserait imaginer le mal que nous avons eu à effectuer ce soin basique, que cela nous a pris 45 minutes, nous sommes suantes et il faut encore ranger la chambre et changer les draps. Salle commune, le midi Tout comme mon début de journée, le midi, c'est la grande débrouille.Je conduis les patients avec mes collègues à leur place, dans une salle qui ressemble à un réfectoire. Chacun portera un "bavoir".J'ai toujours vécu les moments des repas comme un grand "n'importe quoi" dans les maisons de retraite. Une seule AS peut "nourrir" jusque 4 personne en même temps !Je passe outre le fait qu'il faut beaucoup de dextérité et de mémoire pour éviter de se tromper !Les "anciennes" y parviennent avec facilité. Les nouvelles diplômées suivent et commencent par deux, puis trois....Tant de bouches, si peu de mains......Certains résidents prennent leurs repas avec autonomie, mais piochent aussi dans l'assiette de leurs voisins, ce qui provoque des drames et des disputes, et parfois des coups échangés, la nourriture faisant alors usage de projectile.Quelques personnes ne verront jamais le réfectoire.Ces dernières sont confinées dans une petite salle à l'écart en compagnie d'un soignant.Bouillie, et nourriture mixée les accompagnent.Bécquée quotidienne, le plus souvent dans le silence, elles mangent, ou plutôt "ingurgitent" avec docilité. J'ai vu des soignants mélanger dans une assiette, l'entrée, le plat, et écraser le fromage en une mixture répugnante pour aller plus vite. Je ne les juge pas. J'imagine que faire tous les jours les mêmes gestes dans l'indifférence de la hiérarchie toujours préoccupée par le rendement, est loin d'être motivant.La plupart des personnes soignantes sont en Burn out, il n'y a pas assez de personnel, pas assez de moyens matériels et humains, tout est axé sur la productivité et la rapidité. Comment ne pas oublier ce qui nous est enseigné dans ces conditions .?Les jeunes diplômés prennent leurs fonctions avec le sourire, si leurs stages se sont bien déroulés, ils tomberont de haut face à cette réalité. J'ai vu des filles se chamailler pour un fauteuil roulant. Un seul pour 6 chambres, il est vrai qu'il y a de quoi. Quand l'heure des repas arrive, il est plus pratique et rapide d'emmener la personne en fauteuil plutôt que de la faire marcher sans être convaincu qu'elle y parviendra jusqu'au bout.C'est dangereux, et fatiguant pour le patient.Les diplômés qui ont eu "la chance" de voir le côté obscur du métier lors des stages, prendront leurs fonctions dans l'espoir d'avoir signé dans un service gériatrique "convenable" et croiseront les doigts.Cette soignante à qui j'avais dis que c'était inhumain de mélanger les 3 plats dans une même assiette, m'a confié avoir eu des mots avec la hiérarchie car elle n'était pas assez rapide pour donner les repas.Elle avait été convoquée, motif : trop lente et pas assez réactive.En clair, on lui reprochait son implication, sa douceur et son humanité.La dévotion n'a pas de mise dans de tels services, au détriment, bien entendu, et comme toujours, des patients.J'ai constaté qu'une seule chose préoccupe de manière répétitive, les cadres de santé dans ces services, le fameux "pipi-caca"; ou, la fonction d'élimination de la personne âgée.Tout un programme.Des feuilles à l'usage des soignants, des croix à apposer chaque jour, il ou elle a fait 'quoi' ? Les constipations sont étroitement surveillées.Le cas échéant, la guerre est déclarée à coup de médicaments laxatifs sous toutes leurs formes, suppositoires, gelées, lavements....Heureusement, certains cadres soignants comprennent aussi les bienfaits de la marche, même à petites doses, et d'une alimentation adaptée à chaque cas. Certes, cela est contraignant, mais à la vue des tarifs appliqués, c'est un minimum !Chaque établissement dispose d'un nutritionniste, et pourtant on peut en douter lorsque l'on voit ce que l'on donne à manger à des personnes alitées.Donc, dans ces fameuses petites pièces à l'écart, "on" nourrit, on force parfois l'ouverture de la bouche avec la cuillère, une bouchée, l'une après l'autre dans une indifférence totale, une fatigue perceptible du soignant, oserais-je dire, un "ras-le-bol"....Et la journée pour cette équipe se terminera avec moi, par les couchers, c'est l'heure de la sieste.

Chemin inverse. Les mêmes gestes que le matin, on couche les résidents pour quelques heures après avoir vérifié d'un oeil avisé l'intégrité du fameux change, remplacé par un autre si besoin, et seulement si, car les établissements font beaucoup d'économies sur les couches, bien que facturées aux familles.Les personnes les plus valides restent dans la salle commune devant une télévision toujours allumée sur la même chaine. Elles s'endorment, sans doute bercés par le son, sanglées dans leurs fauteuils roulants dans l'indifférence générale.

Alignés, têtes penchées, corps fatigués et douloureux pour certains, positions inconfortables pour d'autres.