"Cela n'arrive qu'aux jeunes" se dit-on à 40 ans.....
Face au doute, je m'enferme dans la salle de bain, munie du batonnet,
sésame d'une future grossesse .....
La barre de mesure s'affiche, et oh ! une seconde !
Je suis donc enceinte, cela explique les symptômes que je ressentais
chaque matin.....
Je suis cependant inquiète,
je souffre d'un fibrôme, et je sais que déclencher une grossesse à mon âge
de surcroit, cela n'est pas raisonnable.
J'ai également un "papillomavirus" diagnostiqué il y a quelques années,
et je dois repasser des examens médicaux pour savoir comment il évolue.
Aucun des éléments n'est présent pour me laisser envisager une grossesse sereine et sans risque, je le sais.
J'ai, heureusement, un bon travail, mais qu'en sera t-il de mes responsabilités,
si durement acquises, si je pars en congé maternité....
Autant de questions qui trottent et se révèlent former de réelles impasses
dans cette euphorie qui aurait du être heureusen, même si elle le fut durant les minutes, isolée dans la salle de bain.
Je suis de repos, je téléphone au premier hôpital, qui me refuse litéralement cette interruption,
"trop de risques", "délai dépassé", "pas de place".....
Je raccroche, et commence à sentir des palpitations,
c'est vrai que le délai légal sera dépassé dans les 8/10 jours si les comptes sont bons.....
Plusieurs centres hospitaliers vont me répondre la même chose, de plus, impossible d'obtenir un rendez vous dans les temps,
ce qui repousserait d'autant plus l'intervention et la rendrait dangereuse.
Un dernier Jocker : une clinique que je connais un peu.
Le service me propose un rendez vous le lendemain,
après leur avoir expliqué posément de quoi il s'agissait.
La secrétaire parait "humaine et compréhensive", et comprend tout à fait
l'urgence.
Mon ami rentre le soir, s'alarme devant mes yeux rougis,
et je lui explique à demi mots que je suis enceinte,
et que j'ai opté pour l'avortement.....
Il vient de divorcer, la situation n'est pas encore claire
avec son ex femme, et surtout, nous ne voulons pas
"bousculer" nos enfants respectifs avec l'arrivée d'un bébé.
Ma fille de 16 ans comprendrait certainement,
mais je ne la sens pas prête à accepter un nourrisson,
le fils de mon ami ayant le même âge qu'elle,
je me doute qu'il aurait la même réaction....
Le lendemain, je me rend, le coeur lourd, à mon rdv.
Surprise : le gynécologue un peu "brut de décoffrage"
au début de l'entretien, m'avoue qu'il est obligé de se
montrer ainsi car les IVG sont en constante augmentation, souvent
par solution de facilité. J'en reste bouche bée!
S'ensuit une éprouvante échographie,
l'image du bébé est à l'écran,
cela me semble irréel, et pourtant, c'est mon enfant.....
Je reste là, les yeux figés sur le moniteur.
Le médecin m'abandonne quelques instants interminables,
je me sens coupable, et pourtant, je ne changerai pas d'avis.
A son retour dans la pièce,
il avoue, avoir fait exprès, afin de bien cerner mon besoin,
et urgence d'IVG. Je suis en larmes, mais parviens à lui
expliquer mon état de santé gynécologique.
Il acquieste, me tend un verre d'eau, et un comprimé,
celui ci arrêtera la grossesse,
celui de demain, provoquera l'expulsion, qui se déroulera
à l'abri de la clinique, dans une chambre individuelle.